Interview : Handicap et scolarité

Chez Domissori, on aime recruter des pépites, des autodidactes passionnés, des profils rares et atypiques dont le parcours professionnel et la vie personnelle sont parfois intimement liés.

C’est le cas d’Elisabeth qui, après s’être consacrée à des postes commerciaux, a vu sa vie chamboulée par l’arrivée d’un de ses enfants, porteur de handicap. Elle réalise alors la difficulté de la vie de parents d’enfant hors normes, entre système scolaire inadapté et marathon administratif pour des prises en charge aléatoires… Elisabeth voit depuis ce jour le monde autrement. Elle décide alors de consacrer sa carrière à accompagner les enfants dans le développement de leur potentiel et d’aider leurs parents à porter un autre regard sur eux.

Aujourd’hui éducatrice chez Domissori, elle s’occupe également de recruter, former et guider de nouvelles recrues. Nous sommes fiers de vous présenter aujourd’hui cette collaboratrice qui porte à elle seule toutes les valeurs d’Educ-up !

Bonjour Elisabeth ! Peux-tu revenir pour nous sur ton parcours ?

Après un bas S et un IUT dans la gestion des entreprises, j’ai occupé plusieurs postes dans le domaine commercial. J’ai ensuite bifurqué vers le monde de l’accompagnement scolaire un peu par hasard…

L’arrivée de mon fils porteur de handicap m’a poussé à voir le monde autrement. Je me suis rendu compte à quel point les adaptations du système scolaire étaient insuffisantes pour y accueillir les enfants à besoins spécifiques. J’ai alors commencé à m’intéresser aux diverses problématiques liées au handicap, côté parents et côté enfants.

Je suis devenu AESH (Accompagnante d’Elèves en Situation de Handicap) dans l’éducation nationale pendant 6 ans. J’aimais ce métier mais pour moi les conditions de travail n’étaient pas réunies pour aider les enfants à développer pleinement leur potentiel. Je souhaitais me sentir vraiment utile.

Comment as-tu complété tes compétences lors de cette reconversion ?

J’ai enchainé plusieurs formations après la naissance de mon fils et je n’ai jamais arrêté depuis car je suis de nature très curieuse !

J’ai passé un CAP petite enfance, puis une formation de conseillère en orientation et de coach scolaire.

Je me suis formée sur le handicap et les besoins spécifiques : les troubles DYS, le TDAH (Trouble du Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité), les TSA (Troubles du Spectre de l’Autisme).

J’ai acquis des outils pour accompagner les enfants non verbaux : LSF (Langue des Signes Française) et méthode Makaton (langage composé de signes et de pictogrammes).

J’ai également suivi une formation sur le dossier MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) pour pouvoir accompagner au mieux les parents face à cette lourde tâche administrative.

Je suis actuellement en formation sur le HP (Haut Potentiel).

Tu as donc ensuite quitté l'éducation nationale ?

Oui. Riche de mes expériences et de mes nouvelles compétences, j’ai décidé de monter mon entreprise d’accompagnement scolaire. Les premières familles que j’ai suivies sont celles que j’avais rencontrées en tant qu’AESH.

Je me suis épanouie dans l’accompagnement individuel des enfants car celui-ci me permet de m’adapter à eux, en n’obligeant pas des élèves atypiques à s’assoir à une table pour apprendre par exemple. On passe par le biais des jeux, de la cuisine…

En tant qu’autodidacte, rien ne m’empêche de piocher dans différentes pédagogies : Montessori, Steiner, Freinet, etc. Je fais ma propre cuisine avec les outils qui m’inspirent !

Ma petite entreprise s’est peu à peu développée, passant de 2-3 élèves au départ à 35 élèves en 2021. Elle a commencé à prendre un peu trop d’ampleur pour moi seule…

C'est à ce moment qu'intervient Domissori ?

Oui, car je n’ai que deux bras et deux jambes ! Je ne pouvais plus gérer toutes les demandes moi-même. J’ai commencé à travailler pour Domissori en proposant des ateliers pédagogiques au domicile des familles. Puis j’ai rejoint le service support au sein duquel j’ai pu agrandir l’équipe pour ne pas avoir à refuser de demandes. J’ai ensuite basculé l’accompagnement de toutes mes familles chez Domissori.

Aujourd’hui j’alterne les ateliers pédagogiques auprès des familles et mon travail auprès de l’équipe support : je recrute, forme et soutiens de nouveaux intervenants en tant que référente handicap pour la région AURA.

Je bénéficie des nombreuses formations internes qui m’ont permis de développer mes compétences, sur la pédagogie Montessori entre autres. Moi qui suis si curieuse et adore apprendre, je suis servie !

Quelles sont tes valeurs communes avec Domissori ?

Nous travaillons dans la même posture bienveillante, que j’ai toujours eu et qui au final correspond à celle de Maria Montessori : considérer que l’adulte ne sait pas tout, respecter, écouter et observer l’enfant

Nous partageons cette notion de tolérance, en acceptant que tout le monde ne soit pas au même niveau et en nous adaptant à chaque individu. Nous avons le même but : aider l’enfant à développer son potentiel et son autonomie.

Je retrouve chez Domissori la même liberté pédagogique que j’ai eue en travaillant pour moi-même.

Je propose aux familles un accompagnement à la frontière des ateliers pédagogiques et du soutien scolaire. Je n’arrive jamais avec des fiches toutes faites, mais je m’adapte à l’enfant et à ses besoins du moment. Il faut être flexible pour pouvoir accueillir le chaos de certains enfants à besoins spécifiques.

Quels sont tes souhaits pour l’avenir ?

Continuer à accompagner les enfants ET les parents. Ces derniers ont aussi besoin d’être écoutés, formés, guidés. Lorsqu’on devient parent, et encore plus lorsqu’on est parent d’un enfant porteur de handicap, on est lâché en pleine nature, on peut ressentir une grande solitude. On a l’impression de ne pas comprendre son propre enfant, sur qui la société porte elle-même un regard négatif…

Je souhaite donner des clefs aux parents pour comprendre le fonctionnement de leur enfant. Les aider à changer le regard qu’ils portent sur lui.

Et je souhaite bien sûr continuer à accompagner les enfants dans le développement de leur potentiel. Selon le psychologue cognitiviste Howard Gardner, il existe 8 intelligences multiples. Dans le système scolaire français, on en exploite seulement 2…

Les enfants hors normes ont énormément de compétences, ils n’ont juste pas celles demandées par le système. Ils sont en échec scolaire car on appuie sur les points faibles au lieu d’appuyer sur les points forts !

Mon rôle est de les aider, à force de questionnements et d’observation, à développer leurs compétences et à trouver une orientation qui leur permette de trouver leur place dans la société.

Un grand merci Elisabeth pour ce partage d'expérience !